L’hypnose est une technique encore parfois considérée comme un objet de foire ou une technique de magicien. Pourtant, l’hypnose marche vraiment… mais pas sur tout le monde. Et son efficacité n’est pas démontrée dans tous les domaines thérapeutiques.
L’hypnose est cet état dit « modifié de la conscience », un moment suspendu entre veille et sommeil. Car contrairement aux idées reçues, durant la séance, le patient ne dort pas. L’activité cérébrale, quoique différente de celle de l’état d’éveil, reste intense. D’abord, il y a une phase d’induction durant laquelle le professionnel détourne puis capte l’attention du patient (souvent par le biais d’une conversation). Ensuite, la transe hypnotique, état de dissociation durant lequel le patient peut être contrôlé. Enfin, la phase de réveil. « Cela ne fonctionne pas sur tout le monde, expliquait à Sciences et Avenir en 2014 le Pr Sztark, chef du pôle anesthésie-réanimation du CHU de Bordeaux. Il faut le vouloir, ça passe avant tout par une relation de confiance, sans résistance ». Parmi les effets de l’hypnose sur le cerveau, des scientifiques ont mis en évidence une activation de réseaux internes (conscience de soi), une baisse de réseaux externes (conscience de l’environnement) et la modulation de circuits cérébraux de la perception de la douleur.
« Par les suggestions et métaphores que nous utilisons, l’enfant ne se focalise plus sur le soin »
La technique fonctionne particulièrement sur les enfants dès 4 ou 5 ans, en général plus coopératifs que les adultes. En chirurgie, aux urgences, pour diminuer une anxiété face à tout geste médical potentiellement douloureux (pose de perfusion, d’un cathéter, ponction lombaire, biopsie médullaire, etc.) ou avant une intervention au bloc opératoire… De très nombreuses techniques d’hypnose permettent la réalisation des soins sans angoisse ni anxiété. Exemple avec l’expérience pionnière de l’hôpital Robert Debré (Paris) où, depuis 2006 et sous la houlette du Dr Chantal Wood, pédiatre, aujourd’hui responsable du Centre de Douleur Chronique du CHU de Limoges, près d’une centaine de spécialistes ont été formés à ces pratiques. « Par les suggestions et métaphores que nous utilisons, l’enfant ne se focalise plus sur le soin », affirmait la spécialiste à Sciences et Avenir en 2015. L’on peut citer par exemple la technique dite du gant magique, une protection virtuelle « construite » autour de la zone concernée par le soin grâce à de simples mots rassurants prononcés par l’hypnothérapeute.
Déjà utilisée au 19e siècle en psychiatrie, l’hypnose rencontre un succès grandissant chez les médecins depuis les années 1950, y compris en France. Pourtant, elle est encore parfois considérée comme sulfureuse au point de ne toujours pas être reconnue par l’Ordre des médecins. Et les études scientifiques dans l’Hexagone ont tardé à valider, ou non, son efficacité. Un manque corrigé en septembre 2015, avec un premier rapport de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) sur le sujet.
Selon l’analyse de plus de 50 essais cliniques publiés entre 2000 et 2014, l’efficacité de l’hypnose est démontrée dans deux indications : au bloc opératoire lors d’opérations nécessitant une anesthésie locale (extraction de dent de sagesse, biopsie mammaire, pose de cathéter, actes de radiologie interventionnelle…) et dans la prise en charge de la maladie du côlon irritable, un trouble qui concerne près de 5% de la population française. La consommation d’antidouleurs et de sédatifs s’en trouve ainsi réduite. En revanche, selon le rapport de l’Inserm, aucun avantage n’a pu être démontré en ce qui concerne d’autres applications (sevrage tabagique, prise en charge de la douleur lors de l’accouchement, schizophrénie, dépression du post-partum…). Une conclusion qui pourrait être liée au fait que les outils scientifiques standardisés prennent difficilement en compte le ressenti et la subjectivité des patients, primordiaux dans des techniques comme l’hypnose…
Source: Sciences & Avenir